La chouette cendrée

hibou

Elle est installée juste en haut de la chute.  C’est elle que l’on appelle la chouette cendrée.  Elle est de la taille de cet autre animal qui ne dort pas, tu sais, celui dont on dit qu’il ne voit pas clair, celui que l’on appelle le hibou.  Elle est semblable la chouette que l’on nomme cendrée celle qui-se fait entendre parfois, celle qui parfois fait du vacarme, criant :  panep..  panep…
Quant à la chute, n’est-ce pas, on la dit très à pic.  Quand la chouette est à la tête de la chute, celle-ci fait toujours le même bruit.  Mais quand il arrive à la chouette de s’envoler plus loin, elle ne doit plus entendre la chute aussi bien.  Alors, lui adressant la parole, la chouette dit :
̶ Pour moi, tu fais exprès de me contrarier.  Quand je suis là-bas, tu ne parles pas et quand je suis pris de ta tête, tu parles.  Tu veux me contrarier, c’est sûr !
Mais il lui est répondu :
̶ Il y a longtemps que je fais ce bruit et je le ferai toujours.  Jamais tu ne pourras faire plus de bruit que moi.
C’est probablement la chute qui a parlé.  Alors la chouette cendrée lui répond :
̶ Je réussirai à te damer le pion.
Et elle se met à ramasser des souris qu’elle dépose à proximité de la chute.  Elle doit en entasser de grandes quantités pour en avoir suffisamment.  Elle se dit qu’elle n’entamera sa provision de souris qu’au moment où elle sera vraiment affamée.  Puis elle s’installe dans un arbre tout près de la tête de la chute et l’on dit qu’elle se met à ululer.  Elle ulule la nuit et le jour, elle ne dort jamais, elle ulule sans arrêt.  On dit qu’elle veut faire plus de vacarme que la chute pour que celle-ci se taise.  On raconte que son cri est beau à entendre.  Elle doit crier panep..  panep…  Voilà les sons qu’elle produit jour et nuit.
Parfois, quand elle a très faim, elle doit manger une souris.  Elle en a fait grande provision d’ailleurs avant de monter à son arbre.  Mais vient le moment où elle les ménage car il n’y en a plus beaucoup.  Ce n’est que lorsqu’elle est très affamée qu’elle se permet d’en manger une.  C’est ainsi qu’elle se comporte, ne mangeant que de temps à autre, jusqu’au moment où il ne lui reste plus que trois souris.
̶ Qu’est-ce que je vais faire, doit-elle penser, je ne réussirai pas à faire plus de bruit que la chute…
Bientôt il ne reste plus que deux souris.  Elle est perplexe.  Mais, comme elle a très faim, elle en mange encore une.
II n’en reste qu’une seule maintenant.  Mais, plus tard, affamée, elle la mange tout en se disant :
̶ C’est la dernière…
Elle n’a plus du tout de provision.  Viens le moment où, manquant de nourriture, elle tombe sur le dos, la pauvre !  La voilà qui flotte sur l’eau.
Celle qui voulait faire plus de bruit que moi, celle qui voulait surpasser la chute, la voilà qui s’en va à la dérive, doit triompher la chute. On raconte que la chouette cendrée est emportée par le courant.  Puis la chute la rejette sur la berge.  Après avoir été ainsi jetée sur le sable, elle doit finir par revenir à elle.
̶ Qu’a-t-il bien pu m’arriver ? se demande-t-elle.
Elle réfléchit, cherchant à savoir ce qui lui est arrivé.  Alors elle doit se souvenir.
̶ Mais, on dirait que je n’ai pas réussi à faire plus de bruit que la chute !
C’est ce qu’elle doit penser.  Elle doit réfléchir et se dire :
̶ J’ai dû tomber dans la chute.  Je n’ai pas réussi à lui damer le pion.  J’ai dû tomber en voulant la dépasser, voilà ce qui a dû m’arriver.  Je n’ai pas réussi à faire plus de bruit qu’elle.
chute
C’était de la chute qu’elle voulait dominer le bruit.  On raconte que la chute a dû lui dire :
̶ Jamais tu ne réussiras à faire plus de bruit que moi.
Par Christine UapistanEnregistré et transcrit par Christine UapistanTirée du livre ATANUTSHE, NIMUSHUM édité par Pipin Bacon et Sylvie Vincent

Source: http://www.tshinanu.tv/chouette-cendree/